Le Bastar, un voyage ethnique au coeur du Chhattisgarh

Situé à 260 km de Raipur, la capitale du Chhattisgarh, le Bastar est une région unique, nichée au sein de forêts primaires et composée d’un kaléidoscope de peuples racines qui perpétuent encore leurs coutumes ancestrales.


Un peu d’histoire


 Bastar
Le Bastar était à l’origine un état princier

Le Bastar était à l’origine un état princier avec Jagdalpur comme capitale.

Il fut créé vers 1324 de notre ère, quand Annama Deva, frère du dernier roi Kakatiya, Pratapa Rudra Deva (1290-1325), quitta Warangal (Telangana) et y établit son royaume.

 Bastar
En arrière plan: Pravir Chandra Bhanj Deo (1929-1966), 20e et dernier roi de l’état princier du Bastar

Pravir Chandra Bhanj Deo (1929-1966), 20e et dernier roi de l’état princier du Bastar, monta sur le trône en 1936, avant que le Bastar ne fut intégré à l’Inde en 1948. 

Il fournit aux tribus de la région un appui politique contre l’exploitation de leurs ressources naturelles et lutta contre la corruption foncière au début des années 1960. Cela provoqua des troubles politiques importants.

En mars 1966, alors que le maharaja dirigeait un mouvement tribal à Bastar, il fut abattu lors d’une «action policière».

 Bastar
Au milieu: le Maharaja (honorifique) actuel, Kamal Chandra Bhanj Deo

Le Maharaja actuel, Kamal Chandra Bhanj Deo, 22e roi du Bastar, est le petit-fils de Vijay Chandra Bhanj Deo, le frère cadet du Maharaja assassiné. Né en 1984, Kamal Chandra est diplômé en business et s’est lancé dans la politique.


Le Bastar, une terre de peuples racines


 Bastar
Dame de la communauté Dhuruva portant un chapeau qui la protège des pluies de la mousson pendant le travail aux champs

Le Bastar est le pays des tribus ;environ 70 % de la population totale du Bastar est composée de peuples premiers, ce qui représente environ 30 % de la population autochtone totale du Chhattishgarh.

Les principaux peuples de la région du Bastar sont les Gonds, Marias, Bhatras, Murias, Halbas et Dhuruva.

 Bastar
Un couple Dandami Maria en costume traditionnel pour effectuer la danse du bison

Ces peuples racines ont développé une culture bien distincte (costumes, dialectes, etc.) et sont connus pour leur artisanat élaboré dans le monde entier ; ils ont été parmi les premiers en Inde à travailler le métal et les figurines en terracotta (voir ci-dessous).

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Dames de la communauté Bhatras vendant du poisson séché dans un marché local (haat)

Les tribus du Bastar sont également connues pour leurs festivals uniques, mélangeant leurs coutumes animistes avec celle de l’hindouisme. Le festival de Dussehra est le plus célèbre et n’est à manquer pour rien au monde !

[ La danse du bison par les Dandami Maria ]


L’art des peuples du Bastar


Les peuples autochtones ont sûrement été les premiers forgerons de l’Inde. Les outils qu’ils créèrent pour les besoins de l’agriculture ont ensuite évolué vers un art qui se perpétue encore de nos jours.

Le Dhokra, le Lohshilp et les poteries en terracotta sont les formes d’artisanat les plus représentatives de la région du Bastar.

Ces arts traditionnels sont transmis de génération en génération par différentes communautés tribales de la région avec, comme épicentres, les villages de Kondagaon, Umargaon et Gunagaon.

 Bastar
L’art du Dhokra, moulage du bronze selon la méthode de la cire perdue

Le Dhokra est un art ancien de moulage du bronze connu aussi sous le nom de cire perdue. Il remonterait à plus de 4 000 ans. Il recrée généralement l’imagerie tribale : scènes de vie, nature et motifs religieux.

 Bastar
Figurines obtenues selon la méthode du Dhokra

Le Lohshilp ou l’art du fer forgé requiert seulement de simples morceaux de ferraille recyclés qui sont chauffés dans une forge, puis tordus et martelés pour leur faire prendre des formes naïves.

 Bastar
Le Lohshilp ou l’art du fer forgé

Les poteries quant à elles sont fabriquées à partir d’argile naturelle, ce qui leur donne une couleur rougeâtre caractéristique. Des motifs tribaux, des éléphants et des chevaux sont les modèles privilégiés de cet artisanat.

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Poteries traditionnelles en terre cuite avec des motifs typiques du Bastar

[ L’art du lohshilp à Kondagaon. ]


Cuisine locale : le chutney de fourmis rouge !


Les divers peuples du Chhattisgarh ont une cuisine bien distincte. Ils ajoutent souvent à leurs mets le fruit de leur cueillette dans les forêts de la région du Bastar.

 Bastar
Plats traditionnels du Bastar et le chutney de fourmis rouges (le petit pot au milieu)

Le mets le plus célèbre ici est sûrement le « Chaprah » ou chutney de fourmis rouge. L’insecte ainsi que ses œufs sont récoltés sur les fourmilières, broyés puis mélangés avec des légumes et plusieurs épices différentes. Ce plat est, pour les autochtones, une bonne source de protéines.
Alors, oserez-vous goûter à ce chutney ?  😉

 Bastar
Vente de fourmis rouges dans un marché local

Côté boisson, l’alcool de mahua est le plus répandu ; il est fabriqué à partir de fleurs séchées de l’arbre du même nom. Il est considéré comme sacré par les tribus du Bastar.

Fleurs séchées de Mahua

 La coutume du Ghotul


Le Bastar a une coutume bien spécifique qui a souvent été mal interprétée : le ghotul, un lieu d’apprentissage pour les jeunes des tribus Murias. La «morale extérieure» l’a longtemps décrit comme un lieu de débauche.

Un ghotul

Le ghotul est une institution où les garçons et les filles célibataires, appelés respectivement Chellik et Motiari, passent des nuits ensemble dans une cabane en terre à la périphérie du village. C’est une forme de coutume prénuptiale. Elle est au centre de la vie sociale et religieuse des Murias. Ils croient que leur divinité suprême, Lingo, a créé le premier ghotul.

Danse des garçons et filles Murias autour du ghotul | Photo : Giancarlo Majocchi

Les jeunes «apprentis» reçoivent un véritable enseignement sur les différentes coutumes et responsabilités sociales de la tribu et sont conseillés pour résoudre certains des problèmes sociaux et psychologiques. On les instruit aussi sur la sexualité, de là vient leur mauvaise (fausse) réputation.


L’ incroyable festival de Dussehra


Le grand char du festival de Dusserha

S’il y a bien un festival unique, c’est celui-ci !

Dusserha est célébré dans toute l’inde, principalement dans le Nord. Mais celui du Bastar est totalement différent et c’est sûrement le Dussehra le plus original auquel vous assisterez. Ici, au lieu de célébrer la défaite du roi-démon, les tribus honorent la déesse Devi Mavli, la divinité native du Bastar, vénérée comme la sœur aînée de la déesse Devi Danteshwari….

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Et maintenant, visitons le Bastar !


Jagdalpur


Le palais de Jagdalpur

Ancienne capitale de l’État princier de la région du Bastar, Jagdalpur est une ville absolument incontournable au Chhattisgarh du fait de sa proximité avec de nombreux sites archéologiques et de réserves naturelles et de sa culture tribale unique qui s’illustre lors de l’exubérant festival de Dusserha….

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Temple Dantewada Danteshwari


L’entrée du temple de Danteshwari

Ce temple de 600 ans construit par les rois Chalukya est l’un des grands sites patrimoniaux de l’Inde et l’un des centres spirituels les plus importants de la région. Il est situé à environ 80 km au sud-ouest de Jagdalpur au confluent des rivières Shankini et Dhankini.

Réplique de L’idole de Danteshwari (les photos étaient interdites dans le sanctuaire)

Le sanctuaire est aussi l’une des 51 Shakti Pithas ; on croit qu’une dent de Sati est tombée ici. Il abrite la déesse Danteshwari, la déité patronne du Bastar, ciselée dans la pierre noire.

Chaque année, pendant Dussehra, différentes tribus des villages environnants se rassemblent ici pour rendre hommage à la déesse.

Les anciennes statues du temple

Chutes d’eau de Chitrakote


Les chutes de Chitrakote en hiver

À 50 km de Jagdalpur, dans le district du Bastar, on tombe sur les magnifiques chutes d’eau de Chitrakote formées par la rivière Indravati, un affluent de la Narmada, dans une gorge en forme de fer-à-cheval. Elles sont connues pour être les plus larges de l’Inde ce qui leur a valu le surnom de « chutes du Niagara indiennes »…

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Chutes d’eau de Tirathgarh


Les chutes d’eau de Tirathgarh

Situées dans le parc Kanger Valley National, à 36 km de Jagdalpur, les chutes d’eau de Tirathgarh font parties des plus belles cascades du Bastar avec celle de Chitrakote. Un lieu absolument incontournable niché au milieu d’une nature luxuriante.

Prêtre d’un des temples de Tirathgarh jouant du « Todi », une forme de trompette

La cascade se divise à la base en multiples chutes, qui ruissellent sur des rochers en escalier créant un panorama absolument enchanteresque. Des marches vous mènent vers le bas des chutes d’eau ou plusieurs petits temples vous attendent.

Les eaux pures de la cascade rendent la baignade très appréciable.

Le bas des chutes de Tirathgarh

Temples de Barsoor


Posé sur les rives de la rivière Indrawati, à environ 75 km, au sud-ouest de Jagdalpur, Barsoor était autrefois un épicentre de la civilisation hindoue. On pense qu’il y avait à l’origine 147 temples. Il nous reste de cette époque quelques vestiges, datant des 10e et 11e siècles.

Twin Ganesha temple

Parmi eux, le temple des Ganesha jumeaux (twin Ganesha temple) dont deux statues en grès du dieu hindou à tête d’éléphant subsistent. Le plus grand d’entre eux fait environ 2 mètres de haut.

Temple Chandraditya

Le deuxième lieu d’intérêt de Barsoor est le temple Chandraditya situé près d’un étang. Il est dédié à Shiva. Le Garbhagriha (sanctuaire) est attaché à un mandapa rectangulaire. Il est joliment décoré de dieux et déesses hindous, mais aussi avec quelques sculptures érotiques.

Détail des sculptures du temple de Chandraditya avec quelques scènes du Kamasutra

La troisième attraction à ne pas manquer à Barsoor est le temple Mama Bhanja, attribué à deux membres de la même famille, oncle (mama) et neveu (bhanja), qui sont censés être les constructeurs. L’édifice, dédié à Ganesha, est bien conservé avec une shikhara (tour) curviligne sur le garbhagriha (sanctuaire).

Temple Mama bhanja

Enfin, le dernier monument d’intérêt à Barsoor est le temple Battista avec ses 32 piliers symétriques. Il est dédié à Shiva et il a la particularité d’avoir deux sanctuaires abritant deux shiva-lingams dont la partie supérieure pivote.

Le temple Battista avec ses 32 piliers symétriques
Jeunes filles faisant pivoter la partie supérieure d’un des Shiva-lingams du temple de Battista

Colline de Dholkal


La colline de Dholkal se trouve dans une forêt dense au sud du Bastar.

Au-dessus d’elle, sur un rocher plat, trône une magnifique idole du seigneur Ganesh qu’on attribue à la dynastie des Chhindak-Nagvanshi au 11e de notre ère.

Le Ganesha de Dholkal juché sur un haut rocher

Le Ganesha du Dholkal, est resté inconnu du monde extérieur pendant très longtemps. On pense qu’en 1936, l’idole avait été repérée par un géologue britannique, Crookshank, alors qu’il inspectait la région. Mais plus tard, surtout après que la zone devint un bastion maoïste, l’idole sortit de la mémoire publique.

C’est seulement en 2012 qu’elle fut redécouverte par un journaliste local. Les photos qu’il prit de l’idole devinrent vite virales dans les médias.

Un trek d’environ une heure à partir du village de Pharaspal (à 25 km de Dantewada) vous sera nécessaire pour atteindre la colline et apercevoir l’idole.


Grottes de Kotumsar et Kailash


Les grottes de Kailash et Kutumsar sont situées dans les forêts denses du parc national de la vallée de Kanger, près des chutes de Tiratgarh.

Celles de Kutumsar descendent jusqu’à à 35 m en-dessous du niveau du sol et possèdent de belles formations de stalagmites et stalactites.

Elles sont considérées comme les secondes plus longues grottes naturelles au monde et se composent de cinq chambres et plusieurs puits aveugles.

Kailash se trouve sur une petite colline et a été découverte en 1993. Elle a une longueur de près de 100 m. Une stalagmite en forme de Lingam, l’emblème du dieu hindou Shiva, est située à l’extrémité de la grotte, d’où son nom.

Les deux grottes sont inondées pendant la saison des moussons, de la mi-juin jusqu’à la mi-octobre. Les sites sont donc fermés aux touristes pendant cette période.


4 Comments on “Le Bastar, un voyage ethnique au coeur du Chhattisgarh”

  1. Absolument attirant l’inde. Ce pays que je dois bientôt visiter et où se trouve mes racines d’origine (tamilnadu). J’ai hâte d’y être.. A bientot

    • Bonjour Claudette, merci de votre message, oui l’Inde est un pays autant fascinant que déboussolant ! À bientôt, faites-moi signe ! Bien cordialement Mathini

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