On ne peut parler de la culture de l’Inde sans évoquer son cinéma, et voici pourquoi : l’Inde est le premier producteur de films au monde ; près d’un millier de films sortent par an dans plus de 10 000 salles rassemblant ‘quelques’ 30 millions de spectateurs chaque jour ! Voilà qui donne le tournis et laissent rêveuses les autres industries du cinéma de part le monde.
En 2013, Le cinéma indien fêtait son centenaire. Ce cinéma, souvent surnommé à tort ‘Bollywood’, peut surprendre voire laisser perplexe le spectateur néophyte. S’il s’est fait longtemps discret, confiné aux seules frontières de l’Inde ou regardé que par une poignée d’indiophiles, ce cinéma fait depuis les dernières décennies des apparitions remarquées dans les festivals cinématographiques et dans les box-offices des pays occidentaux. De la comédie musicale au film d’art, le cinéma indien possède un univers bien à lui.
En 1896, les films des français les Frères Lumière sont présentés à Bombay (maintenant Mumbai). Dans les années qui suivent plusieurs courts métrages sont produits comme ‘The Flower of Persia’ (1898) par le photographe Hiralal Sen, et le documentaire sur les lutteurs The Wrestlers (1899) par HS Bhatavdekar.
Le premier long-métrage reconnu comme tel est Raja Harishchandra (1913), un film muet en langue marathi (Maharashtra, Mumbai) inspiré de l’épopée indienne le Mahabharata. Il a été produit par Dadasaheb Phalke, un pionnier de l’industrie cinématographique indienne. Le film remporte un vif succès commercial et marque un tournant dans l’histoire du cinéma indien. Il pave la voie à d’autres productions régionales.
Les premières salles de cinéma se créent et, dans les années 20, le cinéma se popularise grâce au faible coût des places.
En 1931, Ardeshir Irani produit Alam Ara, le premier film parlant Indien suivi de Kalidas en langue tamoule et télégou.
Toujours dans les années 30 et alors que la technologie de prise de son s’améliore, les comédies musicales se développent dans le cinéma indien comme Indra Sabha et Devi Devyani marquant les débuts de la chanson et de la danse dans les films indiens.
Un Cinéma Parallèle ou cinéma d’art émerge dans les années 1950 au Bengale Occidental comme une alternative au cinéma indien commercial traditionnel, le ‘Masala’ ou ‘Bollywood’. Ces films d’art sont remarqués et remportent des prix dans les grands festivals européens. Le film socio-réaliste de Chetan Anand, Neecha Nagar, remporte le Grand Prix du premier Festival de Cannes en 1946. Satyajit Ray remporte également le Lion d’Or à la Mostra de Venise pour Aparajito (1956), et deux Ours d’argent du meilleur réalisateur au Festival International du Film de Berlin.
Après l’indépendance de l’Inde et ce jusqu’aux années 60, le cinéma indien entre dans un âge d’or. Les films les plus acclamés de tous les temps par la critique et le public ont été produits au cours de cette période.
Les années 70 voient le développement des films commerciaux et les débuts de nombreuses stars « Bollywood » comme Sridevi, Aamir Khan, Madhuri Dixit, entre autres.
Il faut tout d’abord expliquer qu’il n’existe pas qu’un seul cinéma indien mais plusieurs industries cinématographiques régionales chacune dans leur langue propre ; les plus connues sont celle en langue Hindi (Nord de l’Inde), Bengali (Bengale Occidental, Nord-Est de l’Inde), Tamoule (Tamil Nadu, Sud-Est de l’Inde), Telugu (Andhra Pradesh, Sud de l’Inde), Kannada (Karnataka, Sud-Ouest de l’Inde) et Malayalam (Kerala, Sud-Ouest de l’Inde). Ces différents types de cinéma partagent une variété de traits communs (musique, danse, mélodrame) saupoudrés des spécificités de la culture locale.
On distingue, en schématisant, deux formes de genre cinématographique en Inde, les comédies musicales ‘Masala’ ou communément surnommées ‘Bollywood’* et le film d’art connu sous le nom de ‘Cinéma Parallèle’ (Parallel Cinema).
*Le terme « Bollywood » désigne à la base les films en langue Hindi réalisés à Bombay (Mumbai). Il combine les mots « Bombay » et « Hollywood ». 30 % seulement des milliers films réalisés chaque année en Inde sortent effectivement des studios de Bombay, mais il est vrai que le film masala est parti de là.
Dans la cuisine indienne, ‘masala’ désigne un mélange d’épices. De même, le cinéma ‘Masala’ mélange sans complexe différents genres dans un même film le tout assaisonné d’une comédie musicale filmée dans des endroits pittoresques où les acteurs sont parfois soudainement ‘téléportés’. Pour un oeil occidental, ce genre de film peut sembler totalement illogique et improbable mais tellement indien !
Soulignons tout de même que les films de la dernière décennie ont tendance à revenir à plus de réalisme.
Dans la plupart des films ‘Bollywood’, l’importance de la musique est primordiale. Elle peut contribuer à la popularité d’un film ou la défaire ; les morceaux sont, à cet effet, disponibles longtemps avant la sortie du film. La musique ‘filmi’ comme on l’appelle aussi assume parfois une part du support narratif et contribue à l’effet festif du film.
Il faut dire que le cinéma indien est, pour une grande partie de la population, un moment récréatif et les occidentaux qui ont assisté à une projection s’en souviennent encore. Ici, un « chut! » ne serait pas compris. Les spectateurs indiens vivent le film pleinement en reprenant les chorégraphies et les chansons, en applaudissant ou en émettant tout sorte d’onomatopées ; ça aussi c’est typiquement ‘made in India’ ! Un film Bollywood dure 3 heures avec entracte au milieu (oui, oui) et peut avoir autour de 5-6 chansons chorégraphiées réparties sur toute la longueur du film.
[ Un exemple de film Bollywood de 2014, ‘Lovely’ avec Deepika Padukone et Shah Rukh Khan ]
Contrairement aux comédies musicales occidentales, où les acteurs chantent avec leur propre voix, de façon assumée, cet effort-là n’est pas demandé aux acteurs indiens qui chantent en ‘lip-dubbing’ c’est à dire en se synchronisant sur les voix de chanteurs professionnels, dits chanteurs ‘playback’ qui prêtent leur voix .
La qualité des compositions est très variable mais quand les chansons rencontrent un succès populaire, les chanteurs ou chanteuses playback sont propulsés au rang de star, tout autant que les visages à l’écran. Parmi les plus célèbres on peut citer Lata Mangeshkar, Md.Rafi, Kumar Sanu pour les plus anciens et pour la nouvelle génération, Atif Aslam, Arijit Singh, Alka Yagnik.
Le ‘Parallel Cinema’ est à l’opposé du film ‘Bollywood’. C’est un cinéma élitiste, aussi connu comme ‘cinéma d’art’ ou ‘Nouvelle Vague’.
Son contenu est réaliste et naturaliste, avec un œil sur le climat socio-politique de l’époque. Ce cinéma d’auteur est responsable d’un petit 10 % de la production, et se contente souvent d’un public réduit aux classes aisées occidentalisées, intellectuels ou jeunes étudiants privilégiés.
Les premiers films sociaux-réalistes ont été produits dans les années 1920 et ’30. Un des premiers fut Savkari Pash (1925), sur le sort des agriculteurs pauvres. En 1937, Duniya Na Mane V. Shantaram critique la situation des femmes dans la société indienne.
Ce cinéma d’art s’est constitué en tant que mouvement dans les années 50 au Bengale Occidental et a produit des cinéastes de renommée internationale tels que Satyajit Ray, Mrinal Sen, Ritwik Ghatak entre autres. Il a ensuite gagné en importance dans les autres industries cinématographiques régionales de l’Inde et est sorti des frontières indiennes pour remporter de nombreux prix dans les festivals internationaux de cinéma.
Les films ‘Bollywood’ sont souvent le reflet stéréotypé de la société indienne. La famille, les romances et le mariage sont des sujets récurrents.
De nombreux films traitent aussi de l’histoire et de la politique indienne en se basant sur les épopées du Mahabharata et du Ramayana, de l’empire moghol et britannique, la partition de l’Inde… etc. Dans tous les cas les héros et héroïnes sont mis à l’honneur. On aime les héros en Inde !
Le cinéma parallèle comme on l’a vu plus haut s’attaque aux sujets sociétaux, souvent très durs et sombres de l’Inde ; la pègre, la corruption, le sort des travailleurs et des femmes, les exclus, etc. Pendant la période de formation du cinéma parallèle indien dans les années 1940 et 1950, le mouvement a été influencé notamment par le néoréalisme italien comme celui du cinéaste Vittorio De Sica (Le voleur de bicyclette, 1948) ainsi que de la Nouvelle Vague du cinéma français incarnée entre autres par le cinéaste Jean Renoir (Le fleuve,1951).
Les acteurs et actrices en Inde sont de véritables stars au vrai sens du terme et souvent propulsés au rang de héros. Les qualificatifs ‘superstar’ ou ‘megastar’ sont couramment utilisés ; tel est le cas de l’acteur ‘superstar Rajnikanth’, le roi indétrônable du Tamil Nadu (sud de l’Inde).
Les salaires vont de paire aussi. Les acteurs indiens se retrouvent dans le top 10 Forbes des acteurs les mieux payés au monde. Amitabh Bachchan et Salman Khan avec chacun 33,5 millions par an de revenus arrivent à la septième place suivis par Akshay Kumar et Shah Rukh Khan. Leurs revenus proviennent en plus de leur rétribution en tant qu’acteur, de la vente des droits de leurs films aux chaînes de télévision et de la publicité (promotion de produits).
http://www.imdb.com/list/ls057642554/
http://www.imdb.com/list/ls074758327/